Quelques disques marquants en 2025, dans aucun ordre et sans aucune objectivité :
Viagra Boys – Viagr Aboys

Redresseur d’humeur
Il va sans dire que le clip de Uno II dans son ensemble et plus particulièrement la séquence à partir de 1 min 46, approuvée par notre panel canin, fait un peu pour la place de cet album dans le top. Les efforts sans cesse renouvelés de Sebastian Murphy pour décomplexer tous les ventres à bière empotés sur un dancefloor joue aussi. Mais bon, ça ne suffit pas, et la vérité est que nos six Suédois enfilent ici les bangers jazzy post-punk déglingués comme des perles, parvenant à atteindre sur ce 4ème album un sommet tout en ne cherchant à aller nulle part. Jouissif.
Curtis Harding – Departures & Arrivals: Adventures of Captain Curt

2025 l’odyssée de la soul
Captain Curtis allume les boosters de son vaisseau spatial pour se perdre dans l’immensité de la galaxie néo soul. Voix chaude tantôt puissante tantôt caressante, cordes soyeuses, chœurs suaves, basse moelleuse, déracinement et nostalgie, tout y est. Originaire du Michigan mais exilé dans le Sud, Curtis Harding réinvente Stax et ses racines éclectiques (soul bien sûr, mais aussi blues, gospel ou psyché) à lui tout seul. 4ème album, 4ème classique, c’en est presque indécent.
Deafheaven – Lonely People With Power

On ira tous au paradis (des sourds)
Ça fait un bail que réchauffement climatique oblige l’inventivité black metal a gagné d’autres latitudes, la preuve, voilà près de 15 ans que les ricains de Deafheaven dézinguent le genre album après album, à coups de pochettes roses, d’esthétique arty vaporeuse et de cheveux ras, de guitares shoegaze et de mélodies dream-pop. Lonely People With Power, 6ème méfait de la bande de George Clarke, pouvait difficilement échapper à ce top tant je les adore, c’est vrai, mais en plus de cela, l’album respecte finalement suffisamment les canons du genre pour de tels hérétiques que même si t’es ermite à Vällingby depuis 1984 tu kifferas.
Suede – Antidepressants

Remboursé par la Sécu
On avait quitté les Londoniens en 2022 sur Autofiction, très bon album, mais au petit goût d’inachevé, dont le dernier titre résonne à postériori comme un avertissement : Turn Off Your Brain And Yell… Cette fois, Brett Anderson rajoute une bonne couche d’antidépresseurs, et ça va tout de suite mieux, et c’est beau, c’est magique, c’est du Suede quoi. Qu’on se le dise, les vrais kings de la britpop, c’est toujours Suede, alors si tu t’es trompé dans ton dernier achat en achetant la camomille de mémé Jarvis, cette fois, aucune erreur n’est permise, et en plus Brett est toujours le plus bel homme du monde.
Lambrini Girls – Who Let the Dogs Out

Riot grrrl 2k25
La sortie en tout début d’année de ce premier LP fait que tu ne te l’es peut-être pas pris dans la tronche, on va réparer l’oubli : Boum ! Lambrini Girls, c’est un duo de punkettes de Brighton (Phoebe Lunny, chant et guitare et Lilly Macieira, basse), remarqué pour un premier EP en 2023 puis pour avoir mis le dawa dans les fosses lors de tournées avec la cousine australienne Amyl And The Sniffers et les Idles. Who Let The Dogs, paru chez City Slang, c’est une demi heure chrono douche comprise de furie et de punchlines anticonnards cinglantes tous azimuts. Ça semble produit par un Steve Albini qui aurait abusé de l’andouillette, et des morceaux comme Big Dick Energy (contre la culture masculiniste), no Homo (contre l’homophobie, assorti d’un clip furieux) ou Cuntology 101 (dont je vous laisse chercher les paroles) disent assez bien la teneur du propos.
FloFilz – Hagaki 葉書

Jazzy nippop
Alors très franchement, en général les disques de beatmakers me tombent de la platine assez vite, mais là… quelque chose a retenu mon attention, et je me suis pris à réécouter l’album une plâtrée de fois. Avec Hagaki, le jeune producteur autodidacte allemand FloFilz, poulain de la très bonne écurie soul-hip-jazz-funk Melting Pot Music, basée à Cologne, signe une lettre d’amour musicale au Japon. Hagaki (“carte postale” en japonais) se présente comme une collection de vignettes, toutes assez courtes, le plus souvent instrumentales et lorgnant bien du côté jazz, censée capturer l’énergie de Tokyo, ses jazz kissa et ses paysages – et oui, c’est tout à fait ça, et je le dis avec d’autant plus d’aplomb que je n’y ait jamais mis les pieds, mais j’ai maintenant l’impression d’ne revenir !
The Waterboys – Life, Death And Dennis Hopper

Easy riders
À première vue, un album concept sur la vie de Dennis Hopper, tu te dis que ça va finir là où vont le plus souvent ce genre de projets boursouflés : à la poubelle. Mais ho ! t’oublies à qui tu parles coco, à mon chouchou Mike Scott des Waterboys. Donc d’un gars qui a été décrit comme « un fou ou un génie, selon le point de vue » par un critique et dont la riche et longue carrière est marquée par les changements de pied stylistiques constants et un succès mesuré malgré une palanquée de petits bijoux. En gros, Mike Scott est à la musique ce que Hopper fut au cinéma (ainsi qu’à la photo, entres autres), ça se tient. Et c’est là toute la magie de l’album, ça se tient, et bien, on peut s’intéresser au fond, du départ de Hopper du Kansas (le morceau d’ouverture, chanté par Steve Earle, actuel membre de tournée des Waterboys) à sa mort, en passant par ses œuvres, ses amours et ses coups de folie, ou juste savourer un très bon disque de rock, touffu, inventif, diversifié, et accueillant quelques guests dont Springsteen himself.
The Rolling Stones – Black And Blue

Abus de lifting
Sorti en 1976, Black And Blue est un album qui ne ressemble à aucun autre dans la discographie des Stones, et c’est peut-être pour cela que je l’aime bien. Voici une nouvelle mouture signée Steven Wilson, devenu le boss incontournable du remix. Bon, te trompe pas, achète bien la version 2 LP, pas la simple, car le deuxième LP contient des outtakes et surtout des jam sessions qui valent leur pesant de cacahuètes (dont 3 avec le maestro Jeff Beck !), parce que pour ce qui est du nouveau mix de l’album, j’ai l’impression que le gars Wilson a moyennement saisi ce qui fait l’essence et l’unicité du son Stones – le Keith Richards de 1976, à mon avis, lui aurait fait bouffer ses lunettes. Sûrement une idée à la noix de Mick Jagger ça…
