
Avertissement 1 : si tu es concerné par un ou deux points, je t’aime quand même
Avertissement 2 : si tu es concerné par les 6 points, compose le 15
1. « Vous avez une belle collection »
Coefficient exaspération : × 1
Alors non. Le magasin de chaussures peut-être, il en a même une l’hiver et une l’été, mais moi non. Ou alors tu penses que c’est ma collection personnelle et que tu viens de rentrer pas mégarde dans mon salon, mais là encore non (et pour certains disques, heureusement que je ne les possède pas, la vie est assez rude comme ça).
Variante : « Vous avez une belle boutique. » Comme dit mon copain libraire, c’est pas ça qui paye le loyer.
Bon, je sais que c’est une façon maladroite de me remercier pour les quinze secondes de ta promenade dans la boutique, donc ce n’est pas très grave.
2. « Vous avez des pépites »
Coefficient exaspération : × 2
Alors non. Pas tout à fait. Une pépite, ça nous vient de l’anglais nugget, et quand on cause vinyle plutôt que poulet, cela fait référence à une compilation sortie en 1972, Nuggets: Original Artyfacts from the First Psychedelic Era, 1965-68, qui regroupait 27 singles de groupes psyche / garage relativement confidentiels, sélectionnés par Lenny Kaye (guitariste de Patti Smith). (Un coffret sorti en 2023 pour le Record Store Day regroupe cette compilation historique, le volume 2 sorti ultérieurement et un troisième disque de morceaux écartés à l’époque.) Une pépite, c’est donc une rareté méconnue, ou mieux, comme l’a dit je ne sais plus qui, « un morceau inoubliable d’un groupe oubliable » – et pas, mais alors vraiment pas, l’album de Taylor Machin que tu trouveras partout.
Bon, je sais que c’est une façon maladroite de me féliciter parce que, vraiment, il y a beaucoup de choses dans la boutique, donc ce n’est pas très grave. Mais il faudra revenir regarder dans les bons bacs, pour trouver les véritables pépites.
3. « Oh, j’ai pas le temps, je repasserai »
Coefficient exaspération : × 3
Ceci après être resté 1 minute 17 secondes montre en main et avoir regardé 3 disques dans un bac, 2 dans un autre, un peu au pif.
Variante : « Je repasserai sans ma femme / les gamins »
La question est : mais pourquoi diable est-tu rentré puisque tu n’avais PAS – LE – TEMPS ?
Scoop : tu ne repasseras pas, personne n’y croit.
Bon, je sais que c’est une façon maladroite de me remercier pour les 1 minute 17 secondes de ta promenade dans la boutique (voir point 1), mais c’est un peu l’équivalent du « on s’appelle ? », on sait ce que ça vaut.
4. « Vous n’avez pas [album inconnu d’un groupe inconnu sorti au Guatemala en 1963] ?
Coefficient exaspération : × 5
Question généralement posée en ressortant de la boutique les mains vides après avoir fouillé tous les bacs où ledit disque pourrait se trouver, comme si j’en gardais toute une pile derrière le comptoir pour faire exprès que tu ne le trouves pas.
Bon, je sais que c’est une façon maladroite de te justifier de ne rien acheter, parce qu’en fait tu étais juste venu pour passer le temps, mais bon, pourquoi ne pas aller au square ? Ou au Guatemala. Ou simplement ne rien dire.
Facteurs multiplicateurs d’exaspération :
- La récurrence
Il y en a comme ça, tu les vois une fois par trimestre, ils cherchent un truc et un seul, ne regardent absolument rien d’autre, repartent en dix secondes chrono. Et reviennent 3 mois plus tard en demandant exactement la même chose.
Homo sapiens est un mystère.
- L’aveu
« Ah oui, je sais, c’est introuvable, j’ai cherché partout depuis 10 ans, même sur internet. »
Hum, c’est bizarre, parce que moi je regarde sur internet en même temps, et c’est trouvable… ne serait-ce pas que tu n’as de toute façon aucune envie d’y mettre le prix ?
- La menace
« C’est pas grave, je reviendrai. »
Voir facteur multiplicateur 1
5. « Vous me faites un petit quelque chose ? »
Coefficient exaspération : × 25
Pas besoin de te faire un dessin.
Je me pose quand même une question : tu fais pareil, à la boulangerie, chez ton charcutier ou encore, soyons fous, à la Fnac ?
Facteurs multiplicateurs d’exaspération :
- L’anticipation
Il y en a comme ça, ils te demandent ça en entrant dans la boutique.
- La classe écossaise
Il y en a comme ça, ils te demandent ça pour 3 CD à 5 €. Sans frémir.
- La menace
« Vous allez me voir souvent » (si je fais un petit quelque chose évidemment). En vrai, j’en ai pas forcément envie, tu comprends…
Variante : Il y en a comme ça, tu les vois arriver à la caisse avec un vinyle… et là, ils ouvrent leur sac et te sortent des trucs à vendre, histoire de rien payer, sans même t’en avoir parlé avant… et devine quoi ? quand tu refuses, ils vont te reposer le disque (dont ils n’avaient pas vraiment envie, donc) et repartent avec leur camelote. Genre, tu t’es cru à la médiathèque ou quoi ?
6. Faire semblant…
… de ne pas encore avoir compris que ton disquaire pouvait te commander (presque) TOUT ce que tu voulais, et continuer à amazoner frénétiquement tout en prétendant soutenir le commerce local indépendant.
No comment.
Coefficient exaspération : × 837